Dimanche 12 août 2007 j'ai vécu une des expériences les plus dingues qu'on puisse imaginer. Je conte icelle ici, sans exagérer, juste avec un peu d'épices dans la forme narrative pour ne pas vous ennuyer :
Imaginez un aérodrome dans un film style Hollywood 1950 avec des bruits de moteurs de Spitfires et autres Hurricanes en fond, dans lequel le héros (c'est moi), tout frais et bleu débarquant de sa campagne pour demander comment un avion peut voler aux autochtones de l'endroit en question, se voit répondre gentiment par l'autre héros (le pilote aux lunettes de soleil Rayban et au chewing-gum) que s'il veut il peut l'emmener pour faire un essai...
Grand plaisir du petit gars dans ses souliers (toujours moi) qui accepte avec le mélange de peur et de plaisir si particulier d'un enfant à qui on promet le "Grand-8" pour la première fois de sa vie.
Parce que c'était la première fois de ma vie où je pouvais voler de manière consciente et responsable dans un petit coucou. J'avais bien eu une première expérience de vol en petit avion privé de tourisme pour m'emmener à 3000 mètres d'altitude pour la guérison de ma coqueluche, mais j'avais alors 7 ou 8 ans et il y a donc prescription sur les souvenirs réels du moment...
Arrive donc le jour J, ce fameux dimanche dernier, RdV à 17h30 avec Franck Paindavoine, le beau et fringant pilote d'Aéroconcept, sis à l'aérodrome civil de Cuers, dans le var, en Provence, sur la Côte d'Azur la bien nommée.
Frank me parle de ce vol d'initiation calmement, alors que je sens déjà mon coeur s'emballer à l'idée de me faire promener dans les airs par ce pilote certes beau gosse mais que je ne connais pas, finalement. Et dans ce coucou certes sympathique mais qui semble relativement léger face à ma surcharge pondérale inavouée mais hélas bien présente.
Il me parle aussi de la visite "pré-vol", cette vérification à faire sur l'appareil avant de partir voler, et en profite pour m'expliquer les commandes de ce petit avion Ultra Léger Motorisé (ULM). C'est là que j'apprends ce que sont les palonniers et les autres commandes. C'est là aussi que j'apprends que le pilote s'assoit dans le siège de gauche, et que je m'assiérai donc dans le siège de gauche...
... Je lui demande de répéter. Il répète en souriant, et je souris en retour en me disant qu'il a décidément de l'humour, cet homme.
Nous prenons donc place et comme il l'avait dit je m'installe sur le siège du pilote, persuadé qu'il s'agit là d'une initiation "in vivo" de la belle manière, c'est-à-dire qu'il pilotera depuis ses doubles commandes d'instructeur et qu'il me laisse à gauche pour que je me fasse une idée plus précise des conditions réelles qui m'attendent si je décide de prendre des cours, plus tard.
Il me laisse même prendre les commandes en faisant rouler l'avion sur la piste, pour l'amener en position de décollage. Tout fier de mes zigzags qui laissent quand même l'avion sur le bitume, une fois l'appareil en début de piste je m'apprête à bien me caler au fond de mon siège pour observer sa manoeuvre de décollage de pro.
Une première fois ça s'apprécie, ça se goutte, ça se déguste.
Et en plus quand même l'appréhension de ce premier vol m'aide à m'effacer, je dois l'avouer.
Il (le pilote beau gosse aux Rayban, Franck quoi) voit mon mouvement de recul et m'invite à reposer la main sur le manche, à me caler confortablement les pieds sur les palonniers, et à me décontracter pour mieux sentir l'appareil.
Je m'exécute volontiers en me disant qu'il a raison, qu'en suivant les impulsions qu'il donnera je comprendrai mieux "comment ça vole".
Puis il m'explique en faisant la chose qu'il met les gaz, et m'invite encore à me détendre.
Il met les gaz, donc. L'avion accélère, une sensation fantastique quand on le sent se décoller du sol...
... Et là je comprends que c'est vraiment moi qui pilote quand je vois ses mains se poser sur ses genoux et la piste se dérober sous l'avion !
En une fraction de seconde je vous promets que je me suis rappelé de tout ce qu'il venait de me dire en 1/2 heure de briefing, y compris et surtout à quoi servaient ce tube métallique dans ma main droite et les deux pédales sous mes pieds...
Je crois que j'aurais même été capable de vous réciter toutes les tables de multiplication de mon enfance en même temps que les fables de Jean De La Fontaine au complet tellement mes sens étaient aux aguets et mon attention au taquet !
L'avion montait en même temps que ma tension baissait : merveilleux.
S'il m'avait averti de la chose je n'aurais probablement jamais accepté. Mais quel psychologue cet instructeur là, qui m'a permis de connaitre un grand et fort moment en douceur.
Puis après la montée, à 2500 pieds soit environ 750 mètres, le palier.
Il m'explique alors avec quelques démonstrations les commandes "in vivo" (là c'était du vrai, pas la simulation à laquelle je m'attendais au départ) et nous étions au début des 45 mn magiques où il m'a laissé - sous ses directives, conseils, et surveillance - piloter son appareil.
Quelques turbulences pour "m'apprendre les conditions", notamment un effet venturi avec quelques effets de relief assez impressionnant au col de La Fourche, près de Collobrières, des changements de cap pour continuer le survol du coin (en tout Pierrefeu, Sollies-Pont, aperçus plus loin Le Luc, la presqu'ïles de Giens, Porquerolles, St Tropez...) puis le retour, la piste en vue... Là ça faisait peut-être une quarantaine de minutes que je pilotais, mais mon palpitant a commencé à s'emballer et j'avoue ne pas m'être senti capable de continuer pour l'atterrissage lui-même.
J'ai dit d'une voix qui ressemblait probablement plus à une crécelle un jour d'épidémie généralisée qu'à ce timbre si sûr de lui qui fait d'habitude tomber toutes les femmes : "Vous voudrez peut-être reprendre les commandes ?"
Et mon héros (oui, c'est toujours lui mais depuis il est devenu mon héros à moi) de reprendre les commandes dans un geste naturel de bon aloi, rassurant, sans aucune hésitation ni attente - je vous avais dit qu'il était psychologue - et qui enchaine, comme pour ne pas me laisser trop honteux : "C'est vrai que ça souffle un peu, quand même...".
C'est vrai que ça soufflait un peu, quand même.
Et là j'ai pu apprécier la classe de l'homme (toujours le même, normal, nous n'étions que deux dans l'avion, et vous le savez déjà si vous avez bien suivi) qui très calmement descend vers la piste en crabe (le vent, vous suivez ?) et qui redresse l'appareil à quelques centimètres (allez, on va dire un mètre ou deux) de la piste, juste avant que les roues arrières ne touchent le sol.
Un posé en douceur : d'abord les roues arrières, puis la roue avant. L'avion tremble, bruite, puis se détend en même temps que son passager (moi, donc).
Et là, toujours d'un calme olympien et d'une décontraction toute pilotine (j'aime bien glisser quelques néologismes, parfois) mon héros de me demander, gentiment, comme pour ne pas me vexer : "Pourriez-vous freiner maintenant, s'il vous plaît ?"...
Puis il (lui) me laissa ramener l'appareil en roulant vers son hangar, pour triompher devant ma belle (mon épouse, 18 ans qu'elle me supporte, mais que ne ferait-on pas pour impressionner encore et toujours les filles ?) et frimer en avouant ce que je venais de faire.
Bon, la voix encore toute tremblante a un peu empêché la frime devant ma belle, c'est vrai, mais que la dame semblait heureuse pour moi !
Elle m'expliqua plus tard que ce n'était pas uniquement le bonheur, mais que son sourire était provoqué surtout par la vue de mes zygomatiques contractés et de mes yeux écarquillés, preuves de mon bonheur aérien nouveau.
Bref, à ce stade du récit vous savez presque tout.
Il me reste à remercier encore Franck Paindavoine d'Aéroconcept, école de pilotage ULM à Cuers, et à vous laisser voir quelques immortalités de ce grand moment :
https://photos.app.goo.gl/5iuiCdncZnRxyDfK7 (lien réactualisé)
http://picasaweb.google.fr/Alomphega/1erVolEnULMMultiaxes1erCoursDePilotage (lien original obsolète)
Imaginez un aérodrome dans un film style Hollywood 1950 avec des bruits de moteurs de Spitfires et autres Hurricanes en fond, dans lequel le héros (c'est moi), tout frais et bleu débarquant de sa campagne pour demander comment un avion peut voler aux autochtones de l'endroit en question, se voit répondre gentiment par l'autre héros (le pilote aux lunettes de soleil Rayban et au chewing-gum) que s'il veut il peut l'emmener pour faire un essai...
Grand plaisir du petit gars dans ses souliers (toujours moi) qui accepte avec le mélange de peur et de plaisir si particulier d'un enfant à qui on promet le "Grand-8" pour la première fois de sa vie.
Parce que c'était la première fois de ma vie où je pouvais voler de manière consciente et responsable dans un petit coucou. J'avais bien eu une première expérience de vol en petit avion privé de tourisme pour m'emmener à 3000 mètres d'altitude pour la guérison de ma coqueluche, mais j'avais alors 7 ou 8 ans et il y a donc prescription sur les souvenirs réels du moment...
Arrive donc le jour J, ce fameux dimanche dernier, RdV à 17h30 avec Franck Paindavoine, le beau et fringant pilote d'Aéroconcept, sis à l'aérodrome civil de Cuers, dans le var, en Provence, sur la Côte d'Azur la bien nommée.
Frank me parle de ce vol d'initiation calmement, alors que je sens déjà mon coeur s'emballer à l'idée de me faire promener dans les airs par ce pilote certes beau gosse mais que je ne connais pas, finalement. Et dans ce coucou certes sympathique mais qui semble relativement léger face à ma surcharge pondérale inavouée mais hélas bien présente.
Il me parle aussi de la visite "pré-vol", cette vérification à faire sur l'appareil avant de partir voler, et en profite pour m'expliquer les commandes de ce petit avion Ultra Léger Motorisé (ULM). C'est là que j'apprends ce que sont les palonniers et les autres commandes. C'est là aussi que j'apprends que le pilote s'assoit dans le siège de gauche, et que je m'assiérai donc dans le siège de gauche...
... Je lui demande de répéter. Il répète en souriant, et je souris en retour en me disant qu'il a décidément de l'humour, cet homme.
Nous prenons donc place et comme il l'avait dit je m'installe sur le siège du pilote, persuadé qu'il s'agit là d'une initiation "in vivo" de la belle manière, c'est-à-dire qu'il pilotera depuis ses doubles commandes d'instructeur et qu'il me laisse à gauche pour que je me fasse une idée plus précise des conditions réelles qui m'attendent si je décide de prendre des cours, plus tard.
Il me laisse même prendre les commandes en faisant rouler l'avion sur la piste, pour l'amener en position de décollage. Tout fier de mes zigzags qui laissent quand même l'avion sur le bitume, une fois l'appareil en début de piste je m'apprête à bien me caler au fond de mon siège pour observer sa manoeuvre de décollage de pro.
Une première fois ça s'apprécie, ça se goutte, ça se déguste.
Et en plus quand même l'appréhension de ce premier vol m'aide à m'effacer, je dois l'avouer.
Il (le pilote beau gosse aux Rayban, Franck quoi) voit mon mouvement de recul et m'invite à reposer la main sur le manche, à me caler confortablement les pieds sur les palonniers, et à me décontracter pour mieux sentir l'appareil.
Je m'exécute volontiers en me disant qu'il a raison, qu'en suivant les impulsions qu'il donnera je comprendrai mieux "comment ça vole".
Puis il m'explique en faisant la chose qu'il met les gaz, et m'invite encore à me détendre.
Il met les gaz, donc. L'avion accélère, une sensation fantastique quand on le sent se décoller du sol...
... Et là je comprends que c'est vraiment moi qui pilote quand je vois ses mains se poser sur ses genoux et la piste se dérober sous l'avion !
En une fraction de seconde je vous promets que je me suis rappelé de tout ce qu'il venait de me dire en 1/2 heure de briefing, y compris et surtout à quoi servaient ce tube métallique dans ma main droite et les deux pédales sous mes pieds...
Je crois que j'aurais même été capable de vous réciter toutes les tables de multiplication de mon enfance en même temps que les fables de Jean De La Fontaine au complet tellement mes sens étaient aux aguets et mon attention au taquet !
L'avion montait en même temps que ma tension baissait : merveilleux.
S'il m'avait averti de la chose je n'aurais probablement jamais accepté. Mais quel psychologue cet instructeur là, qui m'a permis de connaitre un grand et fort moment en douceur.
Puis après la montée, à 2500 pieds soit environ 750 mètres, le palier.
Il m'explique alors avec quelques démonstrations les commandes "in vivo" (là c'était du vrai, pas la simulation à laquelle je m'attendais au départ) et nous étions au début des 45 mn magiques où il m'a laissé - sous ses directives, conseils, et surveillance - piloter son appareil.
Quelques turbulences pour "m'apprendre les conditions", notamment un effet venturi avec quelques effets de relief assez impressionnant au col de La Fourche, près de Collobrières, des changements de cap pour continuer le survol du coin (en tout Pierrefeu, Sollies-Pont, aperçus plus loin Le Luc, la presqu'ïles de Giens, Porquerolles, St Tropez...) puis le retour, la piste en vue... Là ça faisait peut-être une quarantaine de minutes que je pilotais, mais mon palpitant a commencé à s'emballer et j'avoue ne pas m'être senti capable de continuer pour l'atterrissage lui-même.
J'ai dit d'une voix qui ressemblait probablement plus à une crécelle un jour d'épidémie généralisée qu'à ce timbre si sûr de lui qui fait d'habitude tomber toutes les femmes : "Vous voudrez peut-être reprendre les commandes ?"
Et mon héros (oui, c'est toujours lui mais depuis il est devenu mon héros à moi) de reprendre les commandes dans un geste naturel de bon aloi, rassurant, sans aucune hésitation ni attente - je vous avais dit qu'il était psychologue - et qui enchaine, comme pour ne pas me laisser trop honteux : "C'est vrai que ça souffle un peu, quand même...".
C'est vrai que ça soufflait un peu, quand même.
Et là j'ai pu apprécier la classe de l'homme (toujours le même, normal, nous n'étions que deux dans l'avion, et vous le savez déjà si vous avez bien suivi) qui très calmement descend vers la piste en crabe (le vent, vous suivez ?) et qui redresse l'appareil à quelques centimètres (allez, on va dire un mètre ou deux) de la piste, juste avant que les roues arrières ne touchent le sol.
Un posé en douceur : d'abord les roues arrières, puis la roue avant. L'avion tremble, bruite, puis se détend en même temps que son passager (moi, donc).
Et là, toujours d'un calme olympien et d'une décontraction toute pilotine (j'aime bien glisser quelques néologismes, parfois) mon héros de me demander, gentiment, comme pour ne pas me vexer : "Pourriez-vous freiner maintenant, s'il vous plaît ?"...
Puis il (lui) me laissa ramener l'appareil en roulant vers son hangar, pour triompher devant ma belle (mon épouse, 18 ans qu'elle me supporte, mais que ne ferait-on pas pour impressionner encore et toujours les filles ?) et frimer en avouant ce que je venais de faire.
Bon, la voix encore toute tremblante a un peu empêché la frime devant ma belle, c'est vrai, mais que la dame semblait heureuse pour moi !
Elle m'expliqua plus tard que ce n'était pas uniquement le bonheur, mais que son sourire était provoqué surtout par la vue de mes zygomatiques contractés et de mes yeux écarquillés, preuves de mon bonheur aérien nouveau.
Bref, à ce stade du récit vous savez presque tout.
Il me reste à remercier encore Franck Paindavoine d'Aéroconcept, école de pilotage ULM à Cuers, et à vous laisser voir quelques immortalités de ce grand moment :
https://photos.app.goo.gl/5iuiCdncZnRxyDfK7 (lien réactualisé)
http://picasaweb.google.fr/Alomphega/1erVolEnULMMultiaxes1erCoursDePilotage (lien original obsolète)